22 août 2013 – La lune

Un rayon de lumière éclaire l’intérieur du refuge. Aucune idée de l’heure qu’il est. Je traine… jusqu’à ce qu’Edwige me demande si j’ai bien entendu le réveil. Ah oui ? Il a sonné ? Non, pas entendu… Il faut dire qu’après notre première journée de marche, je n’ai pas demandé mon reste. Donc il faut se bouger. Ranger le sac, préparer les en-cas du midi, glisser des barres de céréales et des fruits secs dans les poches, faire le plein d’eau… Et enfin un peu de rangement et de ménage dans le refuge.

Nous sortons, fermons bien la porte. Nous quittons notre petit refuge à regret.

Dehors, il fait beau. Ciel bleu, quelques nuages quand même. Le sommet d’Herðubreið est dégagé, tout comme celui d’Aksja. Devant nous, les piquets jaunes dans la lave nous indiquent le chemin à suivre.

Nous chargeons nos sac et partons. Nous avançons dans le champ de lave, un champ de lave plutôt ‘plat’, des coulées pétrifiées…

… malgré quelques monuments ici et là, rappelant le chaos qui a régné ici à une époque…

Mais rapidement, nous arrivons face à un terrain nettement plus compliqué…

Les blocs de lave sont enchevêtrés, éclatés, éparpillés…

… mais surtout, par endroit, le champ de lave est plus haut que nous ! Allez, on repère les piquets et c’est parti. A l’assaut !

Photo Edwige

Ce champ de lave est un vrai dédale. Tous autour de nous des blocs, des statues de lave. Nous sommes au cœur du Mordor. Nous arrivons à trouver notre chemin, même si nous cherchons parfois un peu les piquets. Nous devons à plusieurs reprises faire demi-tour et contourner des enchevêtrements de lave impossibles à passer.

Le ciel bleu nous aide beaucoup dans ce paysage si sombre. Et je suis en forme. J’ai bien dormi et bien récupéré. Le poids de mon sac ne pèse pas trop. Nous avançons bien. Nous ralentissons forcément un peu dans notre dédale de lave mais nous gardons quand même un bon rythme. Par contre, nous devons être plus attentives aux endroits où nous posons les pieds, pour être sûr de la stabilité… mais aussi pour ne pas s’accrocher à la lave avec nos vêtements, au risque de tout déchirer !

Nous sortons enfin de ce champ de lave et arrivons devant une étendue de sable et de pierres colorées.

Un peu plus loin, une petite montagne colorée. Ça aussi c’est bon pour le moral après tout ce noir…

Nous marchons encore un peu jusqu’à arriver à une piste. Elle longe une chaîne de montagnes : Dyngjufjallahals. C’est plus simple pour marcher mais un peu monotone. Enfin, nous en profitons pour avancer d’un bon pas. Devant nous, les paysages sont toujours aussi chaotiques que surprenants et magnifiques.

Nous nous arrêtons pour déjeuner. Ce moment de détente est bienvenue. Nous faisons un premier bilan : depuis hier, nous n’avons croisé aucune trace de vie animale mis à part un lagopède et une carcasse d’oiseau non-identifié. Il ne fait pas bon trainer ici…

Nous nous remettons en route. Je me suis refroidie, c’est un peu dur. Cette fois, le sac pèse un peu sur les épaules. Ne pas y penser… Mettre un pas devant l’autre… Nous devons longer toute cette chaine de montagne. C’est long, cela me parait interminable. Et puis, nous quittons la piste et le chemin bifurque sur la gauche pour contourner une coulée de lave plus récente.

Spectacle sublime : le lichen fait son apparition. Il recouvre la lave tout autour de nous. Fini le noir corbeau, voici venir les teintes grises et bleues.

Des statues de lave de dégage du sol ça et là…

Nous arrivons ensuite en haut d’un grand champ de pierres ponces beiges. Au milieu des blocs de lave noire.

Nous descendons et nous le traversons. Welcome to the moon… Sur notre gauche, le champ de lave a stoppé net sa course.

Nous sommes subjuguées par les paysages. Pourtant, autour de nous, c’est à nouveau hostile. Le vent s’est levé et balaye la région. Il souffle fort et de face. Impossible de regarder devant nous, nous nous prenons toute la poussière dans les yeux. Si on regarde un peu autour de nous, le nuage de poussière s’est répandu et nous donne l’impression d’être dans le brouillard…

Nous ne sommes plus très loin de la piste et de du refuge de Dreki. Tout à coup, j’entends Edwige crier derrière moi. Je me retourne : son rain-cover s’est envolé, ainsi que sa gore-tex qu’elle avait coincée dedans. Elle jette son sac et part en courant pour essayer de rattraper ses affaires. Elle disparaît derrière la butte… et ré-apparaît… pour repartir en courant : elle vient de lâcher à nouveau son rain-cover. Je m’assoie sur une pierre pour l’attendre. Elle revient quelques minutes plus tard avec ses affaires sous le bras.

Dernière ligne droite. Nous apercevons une voiture un peu plus loin : nous arrivons donc à la piste qui mène à Dreki. Nous la rejoignons et la suivons. Après nos deux journées isolées de tout, cette piste prend des airs d’autoroute à nos yeux ! Les 4×4 passent et repassent et à chaque fois, nous avons droit à un beau nuage de poussière. Après celle du champ de lave, ce n’était pas forcément nécessaire. Mais bon, quitte à être crade, allons-y jusqu’au bout 🙂

Le refuge de Dreki apparaît devant nous. Enfin… ça va être bon de se poser… à l’abri de la poussière…

Nous allons directement au bâtiment des gardiens. Personne, ils sont dans le refuge en train de faire le ménage. On se pose quelques instants. On jette nos sacs par terre. On s’étale sur la terrasse en bois. On souffle. Vidées !

Nous allons ensuite dans le refuge. Une des gardiennes est là. Je lui dis que j’ai une réservation pour une nuit. Oui, elle a bien ma réservation. Edwige, elle, en profite pour réserver et payer tous les refuges du parcours en même temps. La gardienne nous demande alors si nous avons de la monnaie pour prendre une douche… On est si crade que ça ?? Bon ok, nous sommes couvertes de poussière noire : les habits, la figure, les cheveux et jusque dans les oreilles… Ok, ok, on va venir tout à l’heure pour faire de la monnaie. Elle nous indique alors notre place dans le refuge. C’est à l’étage, un petit recoin où il n’y a que trois places : espace ‘Viti’. Elle nous dit que pour le moment, nous sommes seules mais que si le refuge est plein, elle devra mettre quelqu’un avec nous. Ok. En tout cas, c’est déjà sympa de nous mettre dans un coin tranquille, un peu à l’écart.

Nous en profitons pour lui demander les prévisions météo pour les prochains jours et nous nous renseignons pour savoir s’il y a de l’eau au refuge suivant, celui de Dyngjufell. ‘Oui, oui, je suis quasi certaine qu’il y a de l’eau’. Mmmm… Quasi ? Et quid de la rivière boueuse à proximité ? Je reformule ‘Donc demain, nous n’avons pas besoin de prendre d’eau pour deux jours. Nous pouvons ne prendre de l’eau que pour la journée et nous pourrons refaire le plein à Dyngjufell ?’ ‘Oui, oui’. Ok. Après tout, ce n’était pas très clair de mon coté. J’avais vu qu’il y avait une rivière boueuse mais j’avais aussi eu une information comme quoi il y avait (peut-être) des bidons pour récupérer l’eau de pluie… Bref, elle doit savoir de quoi elle parle donc suivons son conseil… Et nous sommes bien contente de ne pas nous surcharger en eau. Nos sacs sont bien assez lourds comme ça !

Pour le moment, nous sommes seules dans le refuge. Cela dit, il est encore tôt. Et en effet, nous voyons arriver quelques instants plus tard un couple d’italiens… avec un jeune enfant… très jeune… Ils vont dormir dans le grand dortoir qui jouxte notre petit recoin… Le petit s’appelle Georgio. Il est mignon avec ses yeux bleus et ses boucles blondes mais espérons qu’il fait ses nuits ! On a vraiment besoin d’une bonne nuit de repos, surtout avec l’étape qui nous attend demain. Askja. Cette fois, nous allons entrer dans l’antre de la bête. Ce sera l’étape la plus dure et pas seulement à cause du dénivelé. Nous allons enchainer les coulées de lave et nous devrons surtout passer le col de Jónsskarð, à 1300m… On ne sait pas trop à quoi s’attendre même si le gardien d’Herðubreið a été rassurant : j’ai lu qu’il pouvait y avoir du vent, de la neige… bref des conditions climatiques pas forcément évidentes… Dans nos têtes, on s’est conditionné à rencontrer des difficultés… On ne sait jamais…

Après avoir posé nos petites affaires, nous retournons voir la gardienne pour faire de la monnaie pour la douche, comme elle nous l’a suggéré. Nous en profitons aussi pour lui demander si elle peut appeler pour nous le numéro de téléphone donné par le gardien d’Herðubreið, pour arranger un pick-up à Svartarkot. Nous avons en effet choisi cette option pour la fin de notre trek. Ce sera plus court et je pense que nous ne serons pas mécontentes de terminer par une étape plus courte… Nous lui demandons d’abord de se renseigner sur les tarifs. Un pick-up en pleine brousse, au bout d’une piste, ça risque d’être un peu cher… On complique le truc en lui demandant s’il est possible de nous déposer à deux endroits différents : Edwige à Goðafoss et moi à Akureyri. Car il est prévu que je croise Jens, un ami allemand, entre le 25 et le 26 août. Il sera à Akurery le 25, donc si j’arrive directement là-bas, cela lui évitera de prendre le bus ou de louer une voiture pour venir nous retrouver à Goðafoss. Elle appelle. Le mec doit la rappeler plus tard pour lui donner les informations. Ok ! En attendant, direction la douche ! Chaude ?? Mouais… Tiède plutôt. Mais cela fera l’affaire. C’est bon de se débarrasser de toute cette poussière. Je reviens au refuge. La gardienne est passée : 45 000 ISK pour le pick-up de Svartarkot à Akureyri. Mmmm… C’est chère cette affaire… Et pour aller à Goðafoss ? 30 000 ISK. Environ 100€ chacune. C’est un budget mais c’est le prix ici pour être récupéré à l’intérieur de l’île. Et cela nous arrange toutes les deux de terminer un jour plus tôt. Ok, on réserve ! J’envoie un message à Jens pour lui dire que je serai le 25 août à Goðafoss. A voir s’il pourra nous rejoindre ou pas…

Nous revenons au refuge où beaucoup de gens sont arrivés. La journée avance, les voyageurs en 4×4 s’arrêtent ici pour la nuit. Du coup, c’est un peu bruyant et pas très agréable. Petit rejet après nos deux jours seules. Nous dinons. C’est un peu la queue pour cuisiner, on se bat aussi avec le gaz pour l’allumer : le système est pour le moins étrange… Mais on arrive finalement à faire chauffer nos pâtes. Beaucoup d’italiens ce soir. Ça parle fort… J’écris un peu mais très vite je monte me coucher. Georgio est couché avec ses parents et joue avec leur lampe frontale. Dehors, la nuit tombe tout doucement…

Demain, réveil à 7h30 pour une dure journée : il va falloir se reposer. Espérons que Georgio dorme cette nuit…

Photos de la journée

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